Typologies des organisations

Introduction

Il n'est guère de discipline scientifique qui ne commence par tenter de classifier ou de catégoriser les objets ou les phénomènes qu'elle entend étudier, et la discipline « théorie des organisations » n'a pas dérogé à cette règle.

Nombre de théoriciens ont ainsi proposé des essais typologiques permettant de décomposer la catégorie générale « organisations » en différentes familles possédant chacune des traits spécifiques ou manifestant sous des formes et des degrés variables ce que l'on considère comme des traits et des éléments constitutifs de l'organisation.

L'exercice typologique vise notamment à dépasser la formulation de lois générales sur le fonctionnement de l'organisation qui, pour être éventuellement avérées, n'en constituent pas moins une base de prescription peu précise et donc peu opératoire.

Les recherches des années 1960 et 1970 ont permis d'identifier ce type de lois, mais on se rend compte aisément qu'elles n'ont pas véritablement d'importance substantielle.

Exemple

Voici un exemple de loi générale, largement corroborée par de multiples observations : « les organisations de grande taille mettent plus de choses par écrit (on dit qu'elles sont davantage formalisées) que les petites organisations ». Bien que ce phénomène puisse trouver à s'expliquer de différentes façons (par exemple parce que l'augmentation du nombre de participants à une organisation rend difficilement praticable la coordination des activités sur la seule base de la communication directe et orale), la loi correspondante ne constitue qu'un précepte très vague pour un organisateur. Le dirigeant d'une petite ou d'une moyenne entreprise en tirerait simplement l'idée qu'il n'y a guère d'intérêt à brider son organisation par des dispositifs à caractère fortement bureaucratique, mais cela ne reste qu'une indication de principe.

Plus encore, dans la mesure où des personnes créent des organisations pour entreprendre des choses qui ne sont pas déjà faites, la volonté de trouver des lois générales peut très bien conduire les chercheurs à ignorer ou à sous-estimer les propriétés qui rendent précisément des organisations capables d'accomplir ces choses spécifiques, et donc d'exister.

Remarque

Dans certains cas, l'idée de formuler une loi générale sur les organisations débouche sur un énoncé au caractère quelque peu paradoxal. Par exemple, on peut dire : « toute organisation possède une histoire qui lui est propre et qui contribue à lui donner des traits spécifiques ». On peut alors en déduire que les organisations sont à la fois toutes semblables (elles ont toutes une histoire) et toutes différentes (il ne peut y avoir deux histoires identiques).

Complément

En un sens, cet énoncé paradoxal renvoie à la théorie des Idées que Platon expose dans l'un de ses dialogues, intitulé Parménide : chaque objet est une déclinaison matérielle d'une idée. Par exemple, il existe des hommes mais aussi l'idée de l'homme. En paraphrasant, on pourrait dire qu'il existe des organisations mais aussi l'idée d'organisation.

Au-delà de la formulation de lois générales, le travail typologique fournit la base d'élaboration de lois de moyenne portée, dans l'esprit de la construction d'une théorie contingente des organisations. Chaque catégorie peut justifier d'analyses spécifiques, susceptibles de mettre en évidence des logiques de fonctionnement et des préceptes d'organisation ou d'agencement qui ne vaudront que pour elle.

La conception d'une typologie des organisations ne va cependant pas de soi. L'idée est bien sûr d'ordonner la diversité des organisations de façon à pouvoir expliquer leurs différences de structures, de modes de fonctionnement et/ou de buts. Ainsi, les organisations d'un même type devraient posséder des structures, des modes de fonctionnement, des buts, similaires. Cependant, les organisations étant des objets socialement construits, artificiels, et non des objets naturels, on ne dispose pas de critères qui permettraient de distinguer sans contestation possible différentes catégories, à l'instar, par exemple, de ce que peuvent faire des biologistes pour distinguer différentes espèces d'organismes vivants.

En d'autres termes, le travail typologique sur les organisations dépend au moins en partie des préférences du chercheur et de la vision théorique particulière qu'il mobilise. D'où la profusion d'essais typologiques concurrents qui traduisent les désaccords de leurs concepteurs quant à la nature des variables pertinentes devant constituer la base de la catégorisation.

Avant de présenter quelques-uns de ces essais, il n'est pas inutile de s'attarder sur les modalités et les difficultés de la construction d'une typologie.

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