Les cadres dans le champ du travail social : des caractéristiques particulières ?
D'après J. Ion et B. Ravon (1997), la notion de cadre est encore plus floue dans le secteur social que dans l'industrie. Du fait de ses origines (bénévole, militante) et de ses modes d'organisation particuliers (secteur associatif important), ce secteur avait jusqu'alors peu investi cette question de l'encadrement. Toutefois, la réalité se modifie actuellement par la mise en place de nouvelles formes d'organisation, l'apparition de professionnels non originaires du secteur (universitaires, cadres du privé).
Pour rendre compte de la complexité actuelle de l'encadrement du social, ces deux auteurs proposent trois axes de clivage.
Ils différencient tout d'abord les cadres dans une position hiérarchique de ceux qui exercent une mission d'expertise.
Autre élément déterminant pour ces cadres, « l'autonomie dont ils disposent par rapport au politique », sachant que la présence de celui-ci s'est fortement développée depuis la décentralisation. Enfin, leur rapport à l'institution doit être appréhendé à la lumière de leurs itinéraires socio-professionnels, dont découlent trois types de légitimité : l'une fondée sur la capacité d'entreprendre (de créer une structure), l'autre sur l'expérience et la dernière sur un diplôme.
Selon ces auteurs, la place problématique des cadres dans le social est donc à comprendre au regard de l'évolution de ce secteur dont l' « autonomie relative » diminue depuis une dizaine d'années. Par l'introduction de modes de gestion administrative et économique, la nécessité grandissante de partenariats extérieurs, l'apparition de cadres non formés au travail social, la spécificité professionnelle du secteur est mise à mal. Aussi, les cadres sont-ils désormais « sommés d'agir dans plusieurs mondes ». Ils doivent en particulier articuler des impératifs économiques avec une mission d'utilité sociale.
Dans le secteur social, comme de manière générale, selon Floyd et Wooldridge (2000), le cadre intermédiaire est « un acteur clé de la communauté organisationnelle étant donné qu'il agit en tant que médiateur entre le top management et le reste de la communauté ». Plus généralement, ces mêmes auteurs le définissent comme « le coordinateur entre les activités quotidiennes des unités et les activités stratégiques de la hiérarchie ». Nonaka (1994) appuie cette idée en précisant que « ce qui rend le cadre intermédiaire unique est son accès privilégié au top management couplé à ses connaissances du niveau opérationnel. C'est cette combinaison qui leur permet d'agir en tant que médiateur entre la stratégie organisationnelle et les activités quotidiennes ».
Médiateur, coordinateur : différents termes sont utilisés pour définir le rôle du manager opérationnel dans l'organisation. Approfondissons désormais cette question des missions et de la posture attribuées au manager opérationnel.
