Typologies des organisations

La typologie des organisations de H. Mintzberg

H. Mintzberg est un théoricien prolixe qui s'est intéressé à de nombreux sujets : les structures organisationnelles, le pouvoir dans les organisations, les tâches des dirigeants , le management stratégique, etc.

En considérant les organisations comme des coalitions dans lesquelles interviennent différentes catégories d'acteurs qui cherchent à contrôler les décisions et les actions entreprises, H. Mintzberg construit une typologie composée d'une demi-douzaine de cas. Sa proposition repose sur la distinction et l'analyse de deux grands coalitions, interne et externe. La composition de la coalition interne est conforme à celle qui a déjà été présentée à propos de l'analyse des composants de l'organisation.

Rappel

Selon H. Mintzberg, toute organisation est constituée de 5 catégories d'acteurs : le sommet stratégique, la ligne hiérarchique, le centre opérationnel, la technostructure et les fonctionnels de soutien.

Quant à elle, la coalition externe est composée de quatre groupes de détenteurs d'influence :

  • les propriétaires de l'organisation ;

  • les associés qui traitent avec elle : par exemple, dans le cas d'une entreprise, les fournisseurs, les clients, les concurrents et de façon générale, les partenaires commerciaux ;

  • les associations qui représentent les employés de l'organisation ;

  • les publics, c'est-à-dire les groupes représentant des intérêts généraux ou particuliers (pouvoirs publics, mouvements écologiques, collectivités locales, etc.).

Entre ces deux coalitions, se situe le conseil d'administration de l'organisation composé de représentants des agents internes et externes, ce qui lui donne un rôle d'interface.

Chacune de ces coalitions peut prendre différentes configurations. Ainsi, la coalition externe sera dite :

  • dominée si elle est contrôlée par un seul détenteur d'influence ;

  • divisée si elle est composée de groupes rivaux ;

  • passive lorsque le nombre de détenteurs d'influence qui la composent est si important que le pouvoir se trouve extrêmement dispersé.

Quant à la coalition interne, elle sera considérée comme

  • personnalisée lorsque domine le pouvoir de la direction générale ;

  • bureaucratique lorsque l'autorité est maintenue essentiellement par la normalisation des processus de travail ;

  • idéologique si c'est le système de valeurs et de croyances qui cimente principalement l'organisation ;

  • professionnelle lorsque le pouvoir est détenu par ceux qui ont les connaissances techniques nécessaires pour assurer le succès de l'organisation ;

  • politisée si le pouvoir n'est lié à aucune des quatre sources légitimes précédentes mais à la politique en tant que telle.

Théoriquement, le croisement de trois formes possibles de coalition externe et de cinq formes de coalition interne permet d'inventorier une quinzaine de configurations ou de types purs d'organisation.

Sur la base de certaines hypothèses quant à l'association naturelle des formes de coalition, Mintzberg considère cependant que certains types d'organisation sont plus probables, ceux qui sont présentés au tableau suivant :

Tableau 10 : la typologie de H. Mintzberg

Coalition externe

Coalition interne

Type d'organisation

dominée

bureaucratique

instrument

passive

bureaucratique

système clos

passive

personnalisée

autocratie

passive

idéologique

missionnaire

passive

professionnelle

méritocratie

divisée

politisée

arène politique

  1. l'organisation de type "instrument" : c'est le cas de l'organisation au service des buts d'un détenteur d'influence dominant la coalition externe et dont le pouvoir tient à la maîtrise d'une dépendance cruciale pour la survie de l'organisation ou d'une prérogative légale. Dans la mesure où les modalités d'un contrôle externe efficace sont de nature bureaucratique, la coalition interne tend elle-même à revêtir la forme bureaucratique.

  2. l'organisation de type "système clos" : elle se caractérise par la conjonction d'un contrôle interne de type bureaucratique, basé sur la normalisation du travail, et d'une coalition externe composée d'acteurs dispersés et inorganisés. La passivité de la coalition externe laisse une large latitude d'action à la direction générale de l'organisation et à sa technostructure pour poursuivre les buts propres de survie, d'efficacité et de croissance de l'organisation. Cette configuration se rencontre plus particulièrement dans les grandes organisations anciennement établies et vivant dans un environnement relativement stable.

  3. l'organisation de type "autocratie" : la coalition externe est également passive et le pouvoir est concentré dans les mains de la direction générale de l'organisation, laquelle s'identifie au dirigeant principal qui exerce un fort contrôle personnel. Les autres acteurs internes ne peuvent qu'exprimer leur loyauté envers ce dirigeant et les buts qu'il poursuit ou quitter l'organisation. Cette situation se rencontre plus fréquemment dans les organisations dont la petite taille autorise l'exercice d'un pouvoir personnel ou dans celles qui sont encore dirigées par leur fondateur.

  4. l'organisation de type "missionnaire" : la caractéristique principale de ce type d'organisation est l'existence d'une idéologie forte partagée par les membres de la coalition interne, le sens d'une mission que l'on affirme face à une coalition externe essentiellement passive. Le consensus interne sur la nature de cette mission et sur l'idéologie de l'organisation réduit fortement les jeux politiques entre membres de la coalition et la nécessité des contrôles d'essence bureaucratique. L'organisation missionnaire est souvent le produit d'une direction charismatique.

  5. l'organisation de type "méritocratie" : il s'agit d'organisations accomplissant des travaux complexes requérant une variété de compétences de haut niveau. Ce sont ces compétences détenues par les experts et les opérateurs de l'organisation qui constituent la base du pouvoir. La coalition interne est de ce fait de type professionnel et s'impose à la coalition externe qui peut être divisée mais reste essentiellement passive car elle ne maîtrise pas les savoir-faire requis par l'accomplissement des activités.

  6. l'organisation de type "arène politique" : ce qui la caractérise c'est l'existence de conflits à la fois dans la coalition externe, qui est divisée, et dans la coalition interne qui est politisée. Les désaccords entre membres de la coalition externe rejaillissent sur le fonctionnement interne qui est de ce fait fortement marqué par les jeux politiques d'alliances et d'opposition. Cette configuration peut prendre sens comme manifestation de la transition d'une organisation d'une forme à une autre ; elle peut également se révéler comme la seule forme de fonctionnement pour une organisation connaissant un conflit de pouvoir fondamental et durable.

Il existe de multiples façons de classer les organisations et d'établir des typologies. Les quelques essais qui viennent d'être présentés, conçus par des représentants de différentes disciplines (sociologues, psychologues, économistes, spécialistes de management, etc.) illustrent la diversité des modes d'approche et des critères sur la base desquels il est possible d'opérer des distinctions. Bien entendu, cette présentation n'épuise pas la liste des propositions qui ont été faites : il existe d'autres essais généraux ainsi que des typologies affinant la description de telle ou telle catégorie d'organisation appartenant à une classification générale.

Considérés dans leur ensemble, ces essais restent imparfaits voire contradictoires puisqu'une organisation donnée peut être, selon les cas, rangée dans des catégories différentes. Cependant tous ces essais ont le mérite de participer à la recherche des propriétés qui justifient des problématiques et des modes de gestion adaptés, différenciés selon les formes d'organisation, et d'instruire ainsi la question de l'opportunité et des modalités des transferts des pratiques de gestion d'un type d'organisation à un autre. Le travail typologique reste tout à fait utile et précieux.

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